Bonjour. Depuis un certain temps, en particulier après votre dernière lettre aux évêques du monde, de nombreux journaux parlent de « solitude du Pape ». Qu'en pensez-vous ? Vous sentez-vous vraiment seul ? Et quels sont vos sentiments, après les récents événements, alors que nous volons vers l'Afrique ?
Pour dire la vérité, je dois dire que ce mythe de la solitude me fait un peu rire. En aucune façon je ne me sens seul. Chaque jour, je reçois la visite de mes plus proches collaborateurs, à commencer par le Secrétaire d'État jusqu'à la Congrégation pour l'Évangélisation des peuples etc. Et puis je vois régulièrement tous les chefs de dicastère. Tous les jours, je reçois des évêques en visite ad limina : récemment chaque évêque, l'un après l'autre, du Nigéria, puis les évêques d'Argentine. Ces jours-ci, nous avons aussi deux plénières : celle de la Congrégation pour le Culte divin, et celle de la Congrégation pour le Clergé. Et puis il y a les discussions amicales, un réseau d'amitié : ainsi mes compagnons de messe d'Allemagne sont récemment venus pour discuter une journée avec moi... Ainsi, la solitude n'est donc pas un problème, je suis en fait entouré de mes amis, dans une merveilleuse collaboration avec les évêques, avec mes collaborateurs, avec les laïcs et je suis heureux de cela. Je vais en Afrique avec une grande joie : j'aime l'Afrique, j'ai beaucoup d'amis en Afrique, depuis l'époque où j'étais professeur jusqu'à aujourd'hui. j'aime la joie de la foi, cette foi joyeuse qu'on trouve en Afrique. Vous savez que le mandat du Seigneur au Successeur de Pierre est de « confirmer ses frères dans la foi » : j'essaie de le faire. Mais je suis sûr que je reviendrai aussi confirmé par mes frères, contaminé - pour ainsi dire - par leur foi joyeuse. (...)
Parmi les nombreux maux qui affligent l’Afrique, la diffusion du Sida tient une place particulière. On juge souvent que la position de l'Église catholique sur les moyens de lutter contre lui n’est ni réaliste ni efficace. Aborderez vous ce thème pendant votre voyage ?
Moi, je dirais le contraire. Je pense que la réalité la plus efficace, la plus présente et la plus forte de la lutte contre le Sida est justement l'Église catholique avec ses mouvements, avec ses différentes réalités. Je pense à la communauté de Sant’Egidio qui fait beaucoup – de manière visible mais aussi invisible, aux camilliens, à toutes les sœurs qui sont à la disposition des malades... Et je dirais qu’on ne peut pas dépasser ce problème du Sida seulement avec l’argent : il est nécessaire, mais si on n’y met pas un supplément d’âme, cela ne marche pas. On ne peut pas dépasser ce problème par la distribution de préservatifs ; au contraire, ils augmentent le problème. La solution ne peut être que double : premièrement, une humanisation de la sexualité, autrement dit un renouveau spirituel et humain qui porte avec lui une nouvelle manière de se comporter l’un envers l’autre ; et deuxièmement, une vraie amitié, aussi et surtout pour les personnes souffrantes, une disponibilité, et également des sacrifices et des renoncements personnels, pour être au coté les personnes souffrantes. Tels sont les facteurs qui aident et qui produisent des progrès réels et visibles. Aussi je dirais que notre force double, renouveler l’homme intérieurement, lui donner de la force spirituelle et humaine pour un comportement juste à l’égard du corps de l’autre, et cette capacité de souffrir avec les souffrants, de rester présent dans les situations d’épreuve, me semble être la juste réponse, et l'Église le fait, offrant ainsi une contribution très grande et importante. Remercions tous ceux qui le font.