Père Cottier, quelle est la portée de cette « réunification » ?
Le cas Lefebvre a représenté une séparation douloureuse, une rupture. Par conséquent, lorsque l’unité est rétablie, il s’agit d’une chose très positive. En outre, ce qui vient de se passer est un élément qui peut faire réfléchir d’autres encore. Je suis très content de ce qui s’est passé et j’en rends grâces à Dieu.
Vous avez pu constater personnellement la réaction de Jean-Paul II à cette nouvelle ?
Non, mais je sais que le Saint-Père a fait tout son possible pour permettre le retour à la pleine communion avec nos frères.
On est frappé par la possibilité accordée par le Pape aux membres de l’Union sacerdotale Saint-Jean-Marie-Vianney de pouvoir célébrer l’Eucharistie et la Liturgie des heures selon le rite pré-conciliaire. Dans l’optique du Concile, comment interpréter correctement cette concession ?
Cette concession a toujours été donnée. Lorsque Paul VI a instauré le rite romain latin réformé, il avait permis aux prêtres âgés ou ceux qui avaient un motif fondé de continuer à célébrer selon le rite dit de Pie V.
Même lorsqu’il y a eu le cas de certains prêtres retournés à la communion avec Rome, l’indult permettant de célébrer la messe selon cette liturgie a été accordé. Il y a par exemple certains groupes religieux des abbayes auxquelles a été concédé cet indult, il me semble que la même chose a eu lieu pour la Fraternité Saint-Pie-X.
Ce n’est donc pas une chose totalement neuve : je pense qu’avec le cas du Brésil, il y a eu un élargissement de l’indult. Cela veut dire qu’un certain pluralisme est pensable dans le sens du rite latin. Du reste, l’Église catholique a aussi en son sein des membres d’autres rites, comme les rites orientaux. On comprend comment, par respect pour une certaine sensibilité religieuse, il soit possible d’accorder cette autorisation.
Des difficultés persistent pourtant, des résistances, avec la Fraternité Saint-Pie-X en France, avec Mgr Fellay. Vous pouvez préciser les questions faisant difficulté ?
Les difficultés consistent dans le refus du texte conciliaire sur l’œcuménisme, ainsi que la critique face à l’attitude adoptée par le Saint-Père sur les thèmes de l’œcuménisme ou du dialogue interreligieux. À côté de cela, se pose aussi la question du refus du document conciliaire sur la liberté religieuse et de la réforme liturgique. Cette dernière question est celle qui a le plus frappé. Il faut dire que lorsque l’on a introduit la réforme de Paul VI tout ne s’est pas bien passé. Il y a eu trop d’initiatives personnelles des prêtres, des curés, qui ont déterminé une période pour ainsi dire “d’anarchie”. Si bien que certains fidèles, n’ayant pas été préparés, ont été très troublés. Cela explique le pourquoi d’un certain succès – en réalité très limité – de Mgr Lefebvre dans certains milieux. Mais cela ne devrait plus se passer avec les nouvelles générations.
Selon vous, le pas qui a été fait le 15 août par la communauté lefebvriste du Brésil peut-il être interprété comme le début d’un dialogue positif avec le reste des “schismatiques” à l’échelle mondiale ?
Cela dépendra de la confrontation que nous aurons avec eux et de la condition fondamentale qui concerne l’acceptation de Vatican II. Si de leur côté il y a cette disponibilité, nous devrons être ouverts et prêts à les accueillir. Parce qu’il s’agit bien d’œcuménisme et dans ce cas, ce serait un acte immédiat d’œcuménisme à mettre en pratique.